Depuis la publication de notre précédent article sur l’intelligence artificielle (IA) et les embouteillages à Kinshasa, nous avons reçu de nombreuses réactions, parfois sceptiques, concernant la faisabilité de cette idée. Une question revient souvent : comment l’IA pourrait-elle être efficace dans une ville où l’incivilité règne, où les règles sont souvent ignorées, et où les coupures de courant sont fréquentes ?

Ces préoccupations sont légitimes, mais elles ne rendent pas la mise en œuvre de solutions basées sur l’IA impossible. Voici comment l’IA peut, malgré ces obstacles, contribuer à améliorer la gestion du trafic à Kinshasa.
1. L’IA ne dépend pas du civisme pour fonctionner
L’une des forces de l’IA est qu’elle repose sur des données et des algorithmes, et non sur le comportement humain. Par exemple :
Feux de signalisation intelligents : Ces systèmes adaptent automatiquement la durée des feux en fonction de la densité de circulation. Même si certains conducteurs ignorent les règles, l’ensemble du système bénéficie d’une meilleure fluidité.
Analyse des flux de trafic en temps réel : Les outils d’IA comme Waze ou Google Maps, combinés à des caméras intelligentes, peuvent proposer des itinéraires alternatifs pour éviter les zones congestionnées.
Ainsi, l’IA agit en arrière-plan pour améliorer la circulation, sans dépendre directement du respect des règles par tous.

2. Automatisation des sanctions pour renforcer la discipline
Dans un environnement où l’incivilité est fréquente, l’IA peut jouer un rôle clé en automatisant la détection des infractions :
Systèmes de caméras intelligentes : Ces outils peuvent identifier les conducteurs qui grillent un feu rouge, circulent à contresens ou stationnent illégalement. Les sanctions sont ensuite directement envoyées au contrevenant, réduisant ainsi les biais humains et la corruption.
Création de zones à trafic contrôlé : En surveillant automatiquement l’accès à certaines zones sensibles, l’IA limite la surcharge de véhicules et impose des règles strictes.
Ces mesures, bien qu’impopulaires au départ, ont montré leur efficacité dans d’autres grandes villes du monde.
3. Résoudre les coupures d’électricité grâce à l’énergie solaire
Nous sommes bien conscients que les coupures intempestives de courant représentent un défi majeur pour l’installation et l’utilisation d’équipements comme les caméras de surveillance et les feux intelligents. Cependant, cette difficulté peut être surmontée grâce à des solutions énergétiques durables :
Alimentation par panneaux solaires : Les caméras de surveillance, les feux de signalisation intelligents et d’autres dispositifs peuvent être connectés à des systèmes solaires autonomes, évitant ainsi les interruptions dues aux coupures de courant.

Batteries de stockage : Ces dispositifs peuvent stocker l’énergie solaire pour garantir une alimentation continue, même en l’absence de soleil.
Ces technologies ont déjà été mises en œuvre dans des villes confrontées à des problèmes similaires, comme Nairobi ou Accra, et peuvent être adaptées au contexte de Kinshasa.
4. Sensibilisation ciblée grâce aux données
L’IA permet de collecter des données sur les habitudes de conduite et les comportements routiers. Ces informations peuvent servir à :
Identifier les comportements les plus problématiques (par exemple, le non-respect des priorités ou le stationnement anarchique).
Créer des campagnes de sensibilisation ciblées, adaptées aux réalités locales, pour encourager de meilleures pratiques.
Avec le temps, cette sensibilisation peut amorcer un changement progressif des mentalités.
5. Réduire l’influence humaine dans la gestion
L’un des problèmes récurrents à Kinshasa est la faiblesse de l’application des lois, souvent due à des biais humains ou à la corruption. L’IA peut contourner ces obstacles en rendant les processus automatisés et impartiaux :
Gestion des permis de circulation : L’IA pourrait limiter le nombre de véhicules autorisés à circuler dans certaines zones ou à certaines heures.
Contrôles automatiques : En réduisant les interventions humaines, l’IA garantit que les règles sont appliquées uniformément.
6. Des exemples inspirants d’autres villes
Kinshasa n’est pas seule à faire face à ces défis. Des villes comme Jakarta, Lagos ou Nairobi, qui partagent des problématiques similaires, ont commencé à intégrer des outils d’IA pour gérer leur trafic :
À Jakarta, les feux intelligents ont permis de réduire les temps d’attente aux intersections clés.
À Lagos, des caméras automatisées ont dissuadé de nombreuses infractions, améliorant la circulation globale.
À Nairobi, des systèmes solaires alimentent les caméras de surveillance, assurant une continuité de fonctionnement malgré des coupures de courant fréquentes.
Ces exemples montrent que même dans des environnements complexes, l’IA peut jouer un rôle clé pour améliorer le quotidien.
Kinshasa mérite des solutions modernes et adaptées à ses réalités. L’intelligence artificielle ne remplacera pas la nécessité d’une éducation civique et d’une application rigoureuse des lois, mais elle offre des outils précieux pour amorcer un changement. Grâce à des solutions innovantes, comme l’intégration de l’énergie solaire, et une mise en œuvre réfléchie, nous croyons fermement que l’IA peut apporter des résultats concrets, même dans une ville où l’incivilité et les coupures de courant sont des réalités quotidiennes.


